Session
Dans les griffes du loup
Ces temps-ci...
- ... j'écoute en boucle :un peu de tout
- ... je lis le soir :le troisième tome du Trône de fer
- ... j'aime boire :un pastis bien frais
Rayonnages
Brouhaha
- Ookami : Je reviens bientôt... ;)
Bonne nuit à toi aussi wolf. ^^ - Bibasse : konban wa. ca a l'air sympa içi. je repasserais, car ma bougie s'éteint
- Ookami : Merci Bibasse ! Au plaisir de te revoir... ^^
- Vendredi : Bonjour, Ookami !
- myel : Juste un bonjour en passant ici à la recherche de nouvelles lectures... Et des bisous avec :)
- Ookami : Encore faudrait-il que j'arrive à produire de nouvelles écritures... Merci pour ton passage et pour les bisous ^^
- myel : Joyeux Noël Ookami, et des bisous comme cadeau :)
- Vendredi : Tu manques, Ookami ! Bisous et bonne année à toi :)
- Vendredi : 05/06/06: Ookami! T'es passé où?
- myel : Euh bon début d'été :)
Bons voisins
« Mortels, vous vivez comme si vous deviez toujours vivre. » Sénèque
Envol
Le jeune homme était assis sur la roche, adossé au pied du phare, sur un îlot de récifs où les vagues se brisaient calmement. Son regard embrassait l'océan, le vent caressait amicalement sa peau. Ses mains appréciaient le contact avec le rocher froid et rugueux. L'air iodé laissait sa peau un peu salée.
Il profitait de l'instant, hypnotisé par les formes qui se faisaient et se défaisaient à la surface de l'océan. Emporté par le son des vagues rencontrant les récifs, explosions de millions de gouttelettes blanches, il pensait à la vie. Une mouette se posa près de lui.
« Salut » entendit-il.
Il tourna la tête vers l'oiseau.
« Salut, mouette. Qu'est-ce qui t'amène ?
— C'est toi qui m'amènes. Qui d'autre ferait atterrir à ses pieds une mouette qui parle ?
— C'est vrai. » Il eut un sourire moqueur. « Je suis misérable, hein ? »
Il avait croisé ses bras sur ses genoux repliés, pour y poser son menton, le regard un peu désabusé perdu dans l'océan.
« Non, non » rectifia la mouette. Elle fit quelques pas et sauta sur un rocher plus élevé. « Tu avais envie de me voir, n'est-ce pas ?
— Ouais…
— En quoi est-ce misérable d'appeler à soi qui l'on a envie de voir ?
— Parce que t'es une putain de mouette inexistante issue de mon esprit tordu.
— On ne va pas s'arrêter à ça. Tu te rappelles ce loup qui…
— Ça va ! Ça va ! » Il releva la tête et examina les alentours comme pour s'assurer que personne ne pouvait le voir, puis la reposa sur ses bras croisés. « Et puis un loup c'est quand même moins misérable qu'une mouette. »
Une vague plus forte que les autres se brisa devant lui, projetant sur ses jambes une écume froide et salée. La mouette l'évita en s'élevant de quelques coups d'ailes, puis se reposa un peu plus bas sur les rochers dégoulinants, face à la mer.
« Désolé, mouette, je voulais pas dire ça. Je te l'ai dit, c'est moi qui suis misérable.
— Toi, moi, c'est kif-kif. Tu te rends compte que tu t'excuses à toi-même ? »
La mouette lui tournait toujours le dos en disant cela. Elle poursuivit posément :
« Pourquoi voulais-tu me voir ?
— Je… Tu le sais bien. » Il soupira. « Putain, c'est ridicule !
— Mais non. Allez, suis-moi. »
La mouette donna quelques coups d'ailes et s'envola. Surpris, il se dressa sur ses jambes, fit quelques pas en avant et tendit le bras vers elle comme s'il avait pu encore l'attraper. « Attends ! » implora-t-il.
Il ramena son regard vers son bras tendu, un bras couvert de plumes. Ses lèvres découvrirent ses dents en un rictus de peur, puis d'étonnement. Ses bras étaient des ailes musclées.
La mouette évoluait toujours devant lui et donna un petit coup de tête vers l'horizon. « Alors ? »
Le jeune homme fit cinq pas de course vers l'océan, donna une impulsion de ses deux jambes et entama une chute au-dessus des récifs. Il étendit ses bras — ses ailes — pour un saut de l'ange effrayant. Son corps était horizontal, puis piqua vers l'eau. L'air s'écoulait autour de ses ailes, rapide et régulier. L'eau ne se rapprochait plus ; il planait. La mouette volait à côté de lui. Elle prit de l'avance, battit des ailes pour s'élever lentement, décrivant un large cercle. Il la suivit. De plus en plus haut. Le phare n'était plus qu'un point qui s'éloignait derrière eux alors qu'ils volaient, loin au-dessus de l'océan, vers l'horizon.
Il rit : un rire d'enfant, clair et régulier. « Excuse-moi, mouette ! T'es tout sauf misérable.
— C'est ce que je pense de toi. » Elle lui jeta un rapide coup d'œil. « Juste un peu ridicule de voler tout habillé…
— Ouais… » bredouilla-t-il, finissant par un petit rire gêné.
La mouette se fit rieuse, succession de longs cris perdus dans l'immensité de l'océan.
« Qui veux-tu qui te voie ? Les goélands, les mouettes, les albatros ? »
Il regardait la mouette.
« Moi ? Ha, c'est la meilleure ! Pudique vis-à-vis d'un animal issu de ton imagination ! » Elle ajouta d'un ton plus las : « En plus, les plumes recouvrent tout.
— Les plumes ? Non…
— Si. »
Ils volèrent une minute sans rien dire. La mouette brisa le silence :
« Non, tu n'auras plus besoin ni de ton téléphone portable, ni de ton argent, ni de tes papiers, alors arrête de te demander où tu vas pouvoir les mettre. T'aimes les sashimis ?
— Ouais.
— Bienvenue au club. »
La mouette décrocha et plongea vers l'océan, puis dans l'océan. Elle en ressortit, une queue de poisson lui gigotant hors du bec. Remontée à leur altitude de croisière, elle fit disparaître le poisson dans son estomac d'un mouvement de tête.
Il la dévisageait :
« Tu veux pas que je fasse ça ?
— Où est le problème ? C'est gravé dans ton instinct tout neuf d'homme-oiseau. En plus, toi tu peux mâcher, veinard. T'as pas un petit creux ?
— Si, » dit-il d'une voix un peu trop sérieuse. La mouette anticipa sa décision :
« Avec tes habits, tu vas te planter. »
Une traînée de vêtements flottait entre deux eaux. Un trousseau de clés, un téléphone et un portefeuille gagnaient le fond. Loin au-dessus, une mouette et un homme-oiseau volaient doucement.
« Et tu les bouffes sans les vider ? C'est âcre ! grimaça-t-il en recrachant une nageoire.
— Tu t'y feras. Beau plumage, au fait.
— Oh, ça va ! » lâcha-t-il agacé.
Ouais, beau plumage, pensa-t-il.
Contre toute attente, il se sentait le cœur incroyablement léger d'avoir précipité ses affaires dans l'océan. Il ne possédait plus que lui-même. Plus de soucis, plus de ces espoirs qui n'étaient bons qu'à le rendre malheureux.
Il ne lui restait plus qu'à vivre.
Il profitait de l'instant, hypnotisé par les formes qui se faisaient et se défaisaient à la surface de l'océan. Emporté par le son des vagues rencontrant les récifs, explosions de millions de gouttelettes blanches, il pensait à la vie. Une mouette se posa près de lui.
« Salut » entendit-il.
Il tourna la tête vers l'oiseau.
« Salut, mouette. Qu'est-ce qui t'amène ?
— C'est toi qui m'amènes. Qui d'autre ferait atterrir à ses pieds une mouette qui parle ?
— C'est vrai. » Il eut un sourire moqueur. « Je suis misérable, hein ? »
Il avait croisé ses bras sur ses genoux repliés, pour y poser son menton, le regard un peu désabusé perdu dans l'océan.
« Non, non » rectifia la mouette. Elle fit quelques pas et sauta sur un rocher plus élevé. « Tu avais envie de me voir, n'est-ce pas ?
— Ouais…
— En quoi est-ce misérable d'appeler à soi qui l'on a envie de voir ?
— Parce que t'es une putain de mouette inexistante issue de mon esprit tordu.
— On ne va pas s'arrêter à ça. Tu te rappelles ce loup qui…
— Ça va ! Ça va ! » Il releva la tête et examina les alentours comme pour s'assurer que personne ne pouvait le voir, puis la reposa sur ses bras croisés. « Et puis un loup c'est quand même moins misérable qu'une mouette. »
Une vague plus forte que les autres se brisa devant lui, projetant sur ses jambes une écume froide et salée. La mouette l'évita en s'élevant de quelques coups d'ailes, puis se reposa un peu plus bas sur les rochers dégoulinants, face à la mer.
« Désolé, mouette, je voulais pas dire ça. Je te l'ai dit, c'est moi qui suis misérable.
— Toi, moi, c'est kif-kif. Tu te rends compte que tu t'excuses à toi-même ? »
La mouette lui tournait toujours le dos en disant cela. Elle poursuivit posément :
« Pourquoi voulais-tu me voir ?
— Je… Tu le sais bien. » Il soupira. « Putain, c'est ridicule !
— Mais non. Allez, suis-moi. »
La mouette donna quelques coups d'ailes et s'envola. Surpris, il se dressa sur ses jambes, fit quelques pas en avant et tendit le bras vers elle comme s'il avait pu encore l'attraper. « Attends ! » implora-t-il.
Il ramena son regard vers son bras tendu, un bras couvert de plumes. Ses lèvres découvrirent ses dents en un rictus de peur, puis d'étonnement. Ses bras étaient des ailes musclées.
La mouette évoluait toujours devant lui et donna un petit coup de tête vers l'horizon. « Alors ? »
Le jeune homme fit cinq pas de course vers l'océan, donna une impulsion de ses deux jambes et entama une chute au-dessus des récifs. Il étendit ses bras — ses ailes — pour un saut de l'ange effrayant. Son corps était horizontal, puis piqua vers l'eau. L'air s'écoulait autour de ses ailes, rapide et régulier. L'eau ne se rapprochait plus ; il planait. La mouette volait à côté de lui. Elle prit de l'avance, battit des ailes pour s'élever lentement, décrivant un large cercle. Il la suivit. De plus en plus haut. Le phare n'était plus qu'un point qui s'éloignait derrière eux alors qu'ils volaient, loin au-dessus de l'océan, vers l'horizon.
Il rit : un rire d'enfant, clair et régulier. « Excuse-moi, mouette ! T'es tout sauf misérable.
— C'est ce que je pense de toi. » Elle lui jeta un rapide coup d'œil. « Juste un peu ridicule de voler tout habillé…
— Ouais… » bredouilla-t-il, finissant par un petit rire gêné.
La mouette se fit rieuse, succession de longs cris perdus dans l'immensité de l'océan.
« Qui veux-tu qui te voie ? Les goélands, les mouettes, les albatros ? »
Il regardait la mouette.
« Moi ? Ha, c'est la meilleure ! Pudique vis-à-vis d'un animal issu de ton imagination ! » Elle ajouta d'un ton plus las : « En plus, les plumes recouvrent tout.
— Les plumes ? Non…
— Si. »
Ils volèrent une minute sans rien dire. La mouette brisa le silence :
« Non, tu n'auras plus besoin ni de ton téléphone portable, ni de ton argent, ni de tes papiers, alors arrête de te demander où tu vas pouvoir les mettre. T'aimes les sashimis ?
— Ouais.
— Bienvenue au club. »
La mouette décrocha et plongea vers l'océan, puis dans l'océan. Elle en ressortit, une queue de poisson lui gigotant hors du bec. Remontée à leur altitude de croisière, elle fit disparaître le poisson dans son estomac d'un mouvement de tête.
Il la dévisageait :
« Tu veux pas que je fasse ça ?
— Où est le problème ? C'est gravé dans ton instinct tout neuf d'homme-oiseau. En plus, toi tu peux mâcher, veinard. T'as pas un petit creux ?
— Si, » dit-il d'une voix un peu trop sérieuse. La mouette anticipa sa décision :
« Avec tes habits, tu vas te planter. »
Une traînée de vêtements flottait entre deux eaux. Un trousseau de clés, un téléphone et un portefeuille gagnaient le fond. Loin au-dessus, une mouette et un homme-oiseau volaient doucement.
« Et tu les bouffes sans les vider ? C'est âcre ! grimaça-t-il en recrachant une nageoire.
— Tu t'y feras. Beau plumage, au fait.
— Oh, ça va ! » lâcha-t-il agacé.
Ouais, beau plumage, pensa-t-il.
Contre toute attente, il se sentait le cœur incroyablement léger d'avoir précipité ses affaires dans l'océan. Il ne possédait plus que lui-même. Plus de soucis, plus de ces espoirs qui n'étaient bons qu'à le rendre malheureux.
Il ne lui restait plus qu'à vivre.
le Lundi 25 Octobre 2004, 06:22.
Commentaires :
Vendredi
25-10-04
à 08:49
C'est joli, Ookami :)
Répondre à ce commentaire
Re:
Merci à vous deux ! ^^
Je vais casser la poésie, mais à partir de là, il est un peu mal barré, le pauvre... Plus rien à faire que de voler, se nourrir et dormir, sans aucun semblable pour lui tenir compagnie, condamné à rester caché des humains. Et cette mouette dans sa tête, qui peut disparaître à tout instant et en faire l'être le plus seul au monde... J'avais commencé à écrire une suite, mais je ne voyais que des issues tristes et je voulais que ce soit un texte léger, alors j'ai coupé là.
Je vais casser la poésie, mais à partir de là, il est un peu mal barré, le pauvre... Plus rien à faire que de voler, se nourrir et dormir, sans aucun semblable pour lui tenir compagnie, condamné à rester caché des humains. Et cette mouette dans sa tête, qui peut disparaître à tout instant et en faire l'être le plus seul au monde... J'avais commencé à écrire une suite, mais je ne voyais que des issues tristes et je voulais que ce soit un texte léger, alors j'ai coupé là.
Donne-lui la destinée des héros celtiques, qui passent d'un état à l'autre, sans que ça ne les empêche de remprendre leur forme antérieure ;)
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